DERRÉ DE GAND, FRANÇOIS (aussi appelé de Ré et sieur Gand ou de Gand), commissaire général de la Compagnie des Cent-Associés, bienfaiteur des missionnaires et des Indiens, décédé à Québec le 20 mai 1641.

Envoyé en Nouvelle-France comme commissaire général de la Compagnie des Cent-Associés, il est probable qu’il ait accompagné Champlain à son retour à Québec en 1633. Derré était une sorte de saint laïque, de mystique, remarquable par son humilité autant que par sa charité auprès des Indiens, auxquels il servit maintes fois de parrain et dont il pansait lui-même les blessures. Apparemment, on connaît peu de choses de son activité officielle comme commissaire général. Pourtant, en étudiant attentivement son œuvre, on se rend compte que sous le couvert de la bonté et de la compréhension des Indiens, qu’il mettait en confiance auprès des Français, il servait efficacement la Compagnie des Cent-Associés.

Souple, diplomate, psychologue, François Derré savait aussi être ferme. En 1636, particulièrement, il se montra d’une habileté consommée, après s’être rendu compte qu’un groupe d’Algonquins cherchaient à s’entendre avec les Hollandais pour l’écoulement de leurs fourrures. Devant les chefs algonquins réunis à Trois-Rivières, il déclara qu’il n’était que juste que les Français les abandonnent à leur sort, s’ils préféraient que les Hollandais prennent leur cause en main et les défendent. Or les Algonquins savaient bien que les Hollandais ne recherchaient que leurs fourrures et qu’ils ne désiraient pas s’aliéner la sympathie des Iroquois, plus spécialement, des Agniers, ennemis jurés des Algonquins.

Après la mort de Champlain en 1635, François Derré fut réellement le protecteur et le père de la petite colonie française de Québec. Sa charité était sans borne si on recourait à ses conseils. Les Relations des Jésuites ne tarissent pas d’éloges à son sujet. En 1636, il envoya à ses frais étudier en France un jeune Indien particulièrement brillant. Le dépôt de provisions de la compagnie était toujours ouvert aux sauvages miséreux. Il alla plusieurs fois lui-même porter des vivres dans leurs cabanes aux Indiens trop faibles pour se rendre au dépôt. Chaque fois que des troupes de jeunes Peaux Rouges chassés par. l’ennemi venaient se réfugier au fort, les Jésuites hébergeaient les garçons, et M. de Gand se chargeait des filles.

La vie exemplaire de cet homme charitable ne l’empêchait pas d’être un excellent homme d’affaires et de bien remplir les devoirs de sa charge. Dès son arrivée en Nouvelle-France, il s’était rendu compte que les ressources de ce pays nouveau laissaient entrevoir un brillant avenir, et il s’appliqua à en édifier solidement les bases spirituelles et matérielles. Nous avons vu quelle était sa politique de conciliation avec les Indiens pour conserver leur amitié et leurs fourrures. À Québec, il aida par tous les moyens possibles les Ursulines dès leur arrivée. Les Jésuites eurent constamment en lui un solide appui. Ce fut lui qui, en 1638, prit possession de la seigneurie de l’Île-d’Orléans, au nom d’un groupe de membres de la Compagnie des Cent-Associés. À partir de 1639, il s’intéressa particulièrement à l’établissement de Sillery où les Jésuites, sous l’impulsion de M. Noël Brulart de Sillery, avaient l’intention d’établir un village d’Indiens catholiques. Ce territoire avait été concédé à François Derré en 1637. Il céda gratuitement ses droits de propriété aux Jésuites en 1639 et envoya même des ouvriers prêter main-forte aux missionnaires en plus de leur fournir continuellement des vivres.

Généreux à l’excès, François Derré, qui était célibataire, vivait lui-même très pauvrement. Durant les dernières années de sa vie, il se contentait d’une chambre étroite, située sous la sacristie de la modeste chapelle érigée dans la maison des Cent-Associés après l’incendie de Notre-Dame-de-la-Recouvrance. C’est là qu’il mourut le 20 mai 1641. Il fut inhumé le lendemain à côté de M. de Champlain. « Il est mort, lit-on dans la Relation de 1640–1641, dans un sublime exercice de patience ; en un mot, il est mort comme il avoit vescu, c’est à dire, en homme qui cherche Dieu avec verité. »

Raymond Douville

JR (Thwaites), XXI : 108 et passim.— Desrosiers, Iroquoisie.— Dionne, Champlain, II : 461–465 ; François de Ré dit M. Gand, BRH, IX (1903): 23–27.— François de Ré, sieur de Gand, BRH, VII (1901) : 23.— P.-G. Roy, La Ville de Québec, I : 153s.— H.-A. Scott, Une paroisse historique de la Nouvelle-France : Notre-Dame de Sainte-Foy. Histoire civile et religieuse d’après les sources (Québec, 1902).

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Raymond Douville, « DERRÉ DE GAND, FRANÇOIS (aussi appelé de Ré et sieur Gand ou de Gand) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 1, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/derre_de_gand_francois_1F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 1
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1966
Année de la révision:    1986
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