RICHARDS, sir WILLIAM BUELL, avocat, homme politique et juge, né le 2 mai 1815 à Brockville, Haut-Canada, fils aîné de Stephen Richards et de Phoebe Buell, et frère de Stephen et d’Albert Norton Richards ; le 19 octobre 1846, il épousa Déborah Catherine Muirhead (décédée en 1869), et ils eurent trois fils et deux filles ; décédé à Ottawa le 26 janvier 1889.
William Buell Richards fit ses études à la Johnstown District Grammar School de Brockville et à la St Lawrence Academy de Potsdam, New York. On l’admit au barreau en 1837, après qu’il eut fait un stage de clerc à Brockville, dans les études de son oncle Andrew Norton Buell* et de George Malloch. Il s’associa d’abord avec Malloch dans la pratique du droit et, après 1842, avec Buell, raffermissant ainsi les rapports étroits qui existaient déjà entre les familles Buell et Richards. Il devint membre du conseil de la Law Society of Upper Canada en 1849 et fut nommé conseiller de la reine l’année suivante.
Jeune homme, Richards travailla activement dans plusieurs organisations communautaires, dont le Brockville Mechanics’ Institute, puis une société où l’on pratiquait l’art oratoire, une bibliothèque de prêt, le conseil municipal de Brockville, des associations d’agriculture et de nombreux clubs sociaux. Fidèle à la solide tradition des Buell et des Richards, il se révéla aussi un ardent réformiste. Pendant les années 1840, il aida à raviver l’ardeur des réformistes, particulièrement dans les régions rurales du comté de Leeds, où il devint populaire chez les familles établies depuis longtemps et chez les Irlandais catholiques récemment arrivés. En 1844, on le choisit comme candidat dans la circonscription électorale de Leeds aux élections générales, mais il se retira en faveur de son oncle, William Buell*. Désigné de nouveau aux élections de 1848, il remporta la victoire contre Ogle Robert Gowan* que les réformistes de Leeds avaient en horreur ; cette victoire avait de quoi réjouir Richards parce que, durant la campagne électorale, Gowan avait mis en doute sa loyauté lors de la rébellion de 1837–1838. Une fois élu, Richards se mit à distribuer des faveurs politiques aux réformistes de l’est du Haut-Canada, depuis longtemps mis au rancart, chose qu’il trouva parfaitement justifiable, voire même nécessaire.
Ami intime de Robert Baldwin*, parrain d’un de ses enfants, Richards connut rapidement de l’avancement dans le gouvernement réformiste. En 1851, après une nouvelle victoire sur Gowan, il servit à titre de procureur général dans le gouvernement de Francis Hincks et d’Augustin-Norbert Morin*. Pendant qu’il était en fonction, Richards s’intéressa à la réforme des lois en encourageant la refonte du droit écrit et en contribuant à rehausser les exigences de l’admission au barreau. Au milieu d’une chaude controverse – quelques-uns prétendant que sa carrière juridique avait été peu remarquable et de courte durée – il fut nommé, le 22 juin 1853, juge puîné de la Cour des plaids communs. Même si Richards avait obtenu ce poste par influence politique, il était, quoi qu’on en ait dit, bien qualifié pour remplir ce rôle. Il devint juge en chef de cette cour, le 22 juillet 1863.
À titre de juge, Richards passait généralement pour être « un homme de gros bon sens » plutôt qu’un brillant juriste. Il était également réputé pour son esprit, qu’il employait notamment à mettre dans l’embarras les avocats au style ampoulé. Pendant les années 1850 et 1860, Richards visita toutes les régions du Haut-Canada, où il présida les assises du printemps et de l’automne dans les chefs-lieux de comté. Vu ses premières expériences dans le comté de Leeds et sa façon pragmatique d’aborder la loi, il devint un juge estimé du public et on en appela rarement de ses décisions. Il entendit toute une gamme de causes, telles les disputes concernant les limites de terrains, les diffamations, les testaments, les poursuites en désaveu de paternité, les délits de séduction, les mauvaises créances et, à l’occasion, les homicides involontaires et les meurtres. Richards tenait à jour un journal des causes qu’il avait entendues, décrivant en détail les preuves produites et ses impressions concernant les témoins. Ce souci de la perfection dans le travail constitue sans doute une des principales raisons de ses succès en tant que juge et explique sa nomination en tant que juge en chef de la Cour du banc de la reine de l’Ontario, le 16 novembre 1868.
Richards se vit mêlé à plusieurs causes bien connues à cette époque. En 1858, de concert avec William Henry Draper*, il rendit une décision, qui souleva une vive controverse, en faveur du gouvernement de George-Étienne Cartier* et de John Alexander Macdonald* au sujet de l’incident du « double shuffle ». En 1868, il présida le procès de Patrick James Whelan*, accusé du meurtre de Thomas D’Arcy McGee*, procès entaché d’une procédure douteuse ; Richards n’améliora pas sa réputation lorsque, après sa nomination à titre de juge en chef, il siégea lors du procès en appel. En novembre 1874, présidant, à Kingston, une cause d’élection fort controversée, il trouva les associés de Macdonald coupables de corruption et, le mois suivant, ce dernier dut défendre son siège dans une élection partielle, qu’il gagna par une faible marge.
Richards participa aussi aux premiers débats concernant la création d’une cour suprême au Canada et, en 1871, il rencontra à Washington les juges de la Cour suprême des États-Unis afin d’étudier l’efficacité de cette cour. Quand le gouvernement d’Alexander Mackenzie* établit la Cour suprême du Canada en 1875, le choix de Richards au poste de juge en chef obtint la faveur de la plupart des libéraux et même d’un bon nombre de conservateurs.
Le mandat de Richards comme juge en chef – du 8 octobre 1875 au 9 janvier 1879 – fut marqué par la controverse, au parlement et dans la presse, causée en grande partie par le désaccord entourant l’établissement de la cour elle-même. Fortement opposés à la Cour suprême, bon nombre de conservateurs et quelques libéraux protestèrent contre le coût élevé de la cour, son isolement à Ottawa, sa lenteur à rendre les décisions et contre les rapports médiocres des causes qui furent présentées au début. Ils soulignèrent aussi le prétendu népotisme du juge Jean-Thomas Taschereau* et l’absentéisme des juges, y compris Richards lui-même qui se rendait souvent à l’étranger pour étudier les différents systèmes judiciaires. Ces débats revêtaient un caractère politique, et, pendant les premières années de la Cour suprême, Richards et ses collègues, notamment William Alexander Henry, durent assumer la rude tâche d’en définir le rôle à l’intérieur du système judiciaire. Ardent défenseur de la cour, il s’efforça d’en raffermir l’autorité, tout en la tenant éloignée de la sphère législative du gouvernement fédéral. En même temps qu’il tentait de mettre au point les premières règles de procédure, il s’occupa de questions concernant le droit d’appel, le minimum de valeur requis pour les causes relatives aux propriétés et les rapports de la cour avec le comité judiciaire du Conseil privé. Il s’intéressa particulièrement à ce qu’on utilisât la cour comme arbitre dans les relations fédérales-provinciales, et les voyages qu’il fit en Europe et aux États-Unis eurent pour but de voir comment les autres cours avaient résolu les mêmes problèmes.
Au cours des dernières années de sa carrière, Richards occupa plusieurs autres postes. De 1874 à 1876, il représenta l’Ontario au comité d’arbitrage formé pour régler le différend à propos de la frontière entre l’Ontario et le Manitoba. Il fut créé chevalier en 1877, et nommé gouverneur général intérimaire en l’absence de lord Dufferin [Blackwood*]. Malgré l’amitié qui le liait à Macdonald depuis les années 1860, le premier ministre et ses collègues pressèrent Richards de démissionner en janvier 1879, probablement à cause de son état de santé. Après sa retraite, il voyagea beaucoup, résidant en France, à Ottawa et à Toronto. Il mourut d’asthme en 1889.
AO, MU 301–309.— APC, MG 24, B75.— MTL, Robert Baldwin papers ; William Warren Baldwin papers.— Reports of the Supreme Court of Canada, George Duval et al., compil. (64 vol., Ottawa, 1878–1923), I–II.— Brockville Recorder (Brockville, Ontario), 1830–1849.— Canadian biog. dict., I : 9s.— CPC, 1876.— Dent, Canadian portrait gallery, I : 212s.— T. W. H. Leavitt, History of Leeds and Grenville, Ontario, from 1749 to 1879 [...] (Brockville, 1879 ; réimpr., Belleville, Ontario, 1972).— G. R. I. MacPherson, « The code of Brockville’s Buells, 1830–1849 » (thèse de m.a., Univ. of Western Ontario, London, 1966).— « Sir William Buell Richards », Canada Law Journal, nouv. sér., 25 (1889) : 194–196.
Ian MacPherson, « RICHARDS, sir WILLIAM BUELL », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 11, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/richards_william_buell_11F.html.
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Année de la publication: | 1982 |
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