RENAUD, LOUIS, négociant, membre du Conseil législatif, né le 3 octobre 1818 à Lachine, près de Montréal, du mariage de Jean-Baptiste Renaud, voyageur, et de Marie-Reine Garriépy, décédé à Sainte-Martine (comté de Châteauguay) le 13 novembre 1878.

Dès son jeune âge, après de brèves études élémentaires, Louis Renaud dut travailler pour aider son père malade. Avec son frère Jean-Baptiste, il se fit d’abord « roulier de cabrouet », c’est-à-dire charretier. Les deux Renaud exerçaient encore ce métier, ainsi qu’en témoignent les registres de Notre-Dame de Montréal, lorsqu’ils se marièrent à la même messe, le 18 janvier 1841. Jean-Baptiste épousa Sophie Lefebvre, fille de Jean-Baptiste Lefebvre et d’Appoline Abraham, et Louis, auquel les registres ajoutent le prénom de Paul qu’on ne trouve pas à son baptême, épousa Marie-Anne Pigeon, fille de Félix Pigeon et de Véronique-Aimée Trudelle. Dès l’âge de 20 ans, Louis avait amassé assez d’économies pour se lancer dans le commerce et, à 30 ans, il possédait une fortune considérable. Associé avec son frère Jean-Baptiste qui devait plus tard s’établir à Québec pour y fonder la maison J.-B. Renaud & Co., Louis Renaud se livra à des exportations considérables sur le marché anglais et aux États-Unis où leur société avait des agents dans la plupart des grandes villes. Vers 1856, il s’associa à l’honorable John Young, qui en plus de jouer un rôle politique important de 1851 à 1872, fut un des hommes d’affaires les plus remarquables des colonies britanniques en Amérique du Nord. Les deux hommes se livrèrent à des opérations commerciales considérables pour l’époque. Leurs transactions en Angleterre, en France et aux États-Unis rivalisèrent alors avec celles des plus grandes maisons britanniques et américaines. On rapporte que, certaines années, elles s’élevèrent à vingt millions de « piastres ».

Renaud se spécialisa dans le commerce des grains et la plupart des marchands du Bas-Canada auxquels il consentait des avances en argent et en marchandises devinrent ses agents. Il fut le maître du commerce du grain et de la farine dans le Bas-Canada et il put en fixer les prix. Il était au sommet de sa carrière lorsque des transactions malheureuses d’un de ses agents aux États-Unis ébranlèrent son crédit et le forcèrent à vendre à perte des valeurs américaines dépréciées. Il perdit une immense fortune mais il réussit à faire face à toutes les demandes de ses créanciers. Il termina ses jours dans une modeste aisance dans son domaine de Saint-Martine, où il possédait de vastes terres.

Louis Renaud a joué en politique un rôle discret que ses contemporains jugeaient important. En 1856, le Conseil législatif de la province du Canada étant devenu électif, il fut élu dans la division de Salaberry par une majorité de 1 200 voix sur son adversaire, Joseph Doutre*, avocat et un des chefs du parti « rouge ». À l’automne de 1864, il fut réélu par acclamation. À la naissance de la Confédération, en 1867, il fut appelé par proclamation royale à siéger au Sénat. Son mauvais état de santé et surtout l’affaiblissement de sa vue le forcèrent à démissionner en 1873, et il fut alors remplacé par son gendre. De son premier mariage, il avait eu onze enfants dont une seule fille Zoé-Aimée, qui épousa François-Xavier-Anselme Trudel*, et un fils, Napoléon, qui, après avoir été zouave pontifical, lui succéda à la direction de son commerce. En secondes noces, au mois de mars 1864, il épousa Hélène Chicoux-Duvert, veuve de Charles-Joseph-René Drolet, qui lui survécut. Les funérailles de Louis Renaud eurent lieu à l’église Notre-Dame de Montréal et l’inhumation se fit au cimetière de la Côte-des-Neiges.

À sa mort, la Minerve écrivait le 15 novembre : « Il fit connaître avantageusement le nom canadien sur les marchés d’Angleterre et de la France par des opérations commerciales qui dénotaient chez lui un génie exceptionnel. » Quelques années avant sa mort, en 1875, un des principaux chroniqueurs de Montréal, le révérend John Douglas Borthwick, lui consacrait une biographie très élogieuse dans laquelle on pouvait lire ceci : « Bien que son enfance fut privée de toute instruction, il réussit, grâce à une intelligence supérieure, à une énergie indomptable, à une très forte constitution et à un travail presque surhumain à acquérir des connaissances et une expérience qui le rendirent bientôt maître en matière de commerce. Il a eu peu d’égaux et il n’a peut-être pas eu de supérieur pour la justesse du coup d’œil, la promptitude de la conception et la rectitude de son jugement. » Il fut pendant toute sa carrière ami de George-Étienne Cartier dont il appuyait la politique et qui le consultait, ce qui a fait écrire à Borthwick : « Malgré son peu de culture littéraire, son expérience, ses conseils, sa fermeté et son énergie ont souvent exercé une influence décisive sur la politique de son temps. »

J.-C. Bonenfant

La Minerve (Montréal), 15 nov. 1878.— Borthwick, Montreal, 110.— É.-Z. Massicotte, Deux grands négociants, BRH, XLII (1936) : 339s.

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J.-C. Bonenfant, « RENAUD, LOUIS », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 10, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/renaud_louis_10F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 10
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1972
Année de la révision:    1972
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