NICHOLAS DE LYNNE, père, moine franciscain, mathématicien et astronome à Oxford ; circa 1360.

Beaucoup voient en lui l’auteur de l’Inventio fortunata, description des régions arctiques qui n’existe plus. La mention la plus ancienne de cet ouvrage se trouve dans une carte de Johannes Ruysch, dans la Geographia de Ptolémée (Rome, 1508), où l’on dit que l’Inventio fortunata décrit un haut rocher magnétique sous le pôle Arctique (montagne dans les environs de Thulé, au Groenland, bien connue des Islandais du Moyen Âge, qui avaient remarqué dès le xive siècle la déviation de la boussole). Dans sa carte du monde qui date de 1569, (Ganong, Crucial Maps, I : 104), Mercator écrivait qu’en 1364, un prêtre, à la cour de Norvège, dit à Jacques Cnoyen de Bois-le-Duc, dont on ignore les dates et dont les œuvres se sont perdues, qu’en l’an 1360, un certain moine anglais, franciscain et mathématicien d’Oxford, arriva dans l’île septentrionale. Il en partit ensuite et, continuant sa route grâce à ses arts magiques, décrivit tous les lieux qu’il avait vus et en prit la hauteur au moyen de son astrolabe. Hakluyt affirme que ce moine écrivit l’Inventio fortunata à la suite d’un voyage qu’il fit en 1360. Accompagnant d’autres navigateurs vers l’île la plus septentrionale du monde, il y laissa ses compagnons et poursuivit sa route seul. Il présenta au roi Édouard III d’Angleterre le récit de ses voyages, l’Inventio « qui liber incipit a gradu 54. usque ad polum ». Ce même moine « à diverses fins par la suite quitta l’Angleterre et y revint à cinq reprises ». On trouve des mentions semblables dans les écrits de John Dee (qui, toutefois, croyait que le moine était le frère mineur Hugo d’Irlande, voyageur qui écrivait en 1360) et de Peter Heylyn. Aucun de ces auteurs n’a donné à ce moine le nom de Nicholas de Lynne, mais la plupart des historiens subséquents ont mentionné ce nom. Cependant, ce n’est que ces toutes dernières années que Nicholas de Lynne a acquis une réputation considérable en sa qualité d’un des plus anciens explorateurs anglais de l’Arctique, malgré l’absurdité de l’affirmation qu’il alla seul au pôle, puis qu’il entreprit cinq autres expéditions dans l’Arctique. Thomas Blundeville paraît s’être rapproché de la vérité quand il a écrit en 1589 qu’il ne croyait pas que le moine eût fait un voyage dans l’Arctique, « à moins qu’il n’ait eu quelque froid démon de la région médiane de l’air pour lui servir de guide ».

Toutefois, l’Inventio fortunata, autant qu’on puisse en juger, renfermait une description digne de foi du Groenland et de l’archipel canadien, dans la mesure où elle s’appuyait sur les voyages qu’y avaient faits les Islandais vivant au Groenland au Moyen Âge. En outre, ce livre eut une large diffusion en Europe et il a pu servir à Colomb. Son auteur, que ce soit Nicholas de Lynne ou non, a, à peu près sûrement, obtenu ses renseignements, non pas de première main grâce à des voyages à travers l’Arctique, mais auprès du prêtre Ivar Bàrdarson qui, de 1340 à 1360 à peu près, fut administrateur du diocèse de Gardar au Groenland et, en cette qualité, voyagea beaucoup et acquit, directement ou indirectement, maintes connaissances au sujet de l’Arctique canadien oriental. Il écrivit une description du Groenland qui eut une grande diffusion : elle fut traduite à l’intention d’Henry Hudson qui en emporta un exemplaire au moins au cours de certains de ses voyages. Ivar Bardarson rentra en Norvège, peut-être en 1361 ; il y était sûrement en 1364. Le moine d’Oxford peut l’y avoir connu personnellement et avoir compilé l’Inventio fortunata. En tout cas, des extraits de l’Inventio, qu’on relève dans des ouvrages subséquents, révèlent à coup sûr une source islando-groenlandaise.

T. J. Oleson

Thomas Blundeville, A briefe description of universall mapes and cardes [...], MBlundeville his exercises [...] (London, 1622), 747–799.— Hakluyt, Principal navigations (1903–05), I : 303 ; X : 301 ss.— Peter Heylyn, Cosmographie (London, 1657).— La carte de Johannes Ruysch, Universalior cogniti orbis tabula ex recentibus confecta observationibus, dans Claudius Ptolemy, In hoc opere haec continentur Geographiae (Rome, 1508).— B. F. DeCosta, Inventio fortunata : arctic exploration with an account of Nicholas of Lynn [...] (New York, 1881) ; Sailing directions of Henry Hudson from the old Danish of Ivar Bardsen (Albany, 1869).— H. R. Holand, An English scientist in America 130 years before Columbus, Wisconsin Academy of Science and Letters Trans., XLVIII (1959). — N. A. E. Nordenskiöld, Facsimile atlas to the early history of cartography, with reproductions of the most important maps printed in the XV and XVI centuries [...] (Stockholm, 1889).— Oleson, Early voyages, 105–108.— E. G. R. Taylor, A letter dated 1577 from Mercator to John Dee, Imago Mundi, XIII (1956) : 56–58.

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T. J. Oleson, « NICHOLAS DE LYNNE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 1, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/nicholas_de_lynne_1F.html.

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Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1966
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