LIPSETT, GENEVIEVE ELSIE ALICE (Skinner), institutrice, journaliste et partisane du suffrage féminin, née le 29 juillet 1885 à Kankakee, Illinois, fille de Robert Lipsett et d’Annie Macdonald ; le 6 juin 1911, elle épousa à Winnipeg Robert Curtis Skinner, et ils n’eurent pas d’enfants ; décédée le 29 janvier 1935 à Montréal.

Genevieve Elsie Alice Lipsett naquit aux États-Unis, mais elle passa les premières années de son enfance à Toronto et vécut aussi quelque temps dans une ferme de culture du blé près de Napinka, au Manitoba. Elle repartit avec sa famille aux États-Unis quand elle avait 12 ans. En 1900, elle entra au Normal College of the City of New York ; elle obtint son diplôme trois ans plus tard, puis elle retourna au Manitoba pour travailler comme institutrice dans une école rurale. Malgré son jeune âge, elle devint commissaire d’école. À 21 ans, elle avait déjà trouvé sa vocation, le journalisme, et elle avait décroché un poste au « Sunshine department » du Winnipeg Telegram. Elle y resterait jusqu’en 1920, et se ferait connaître par ses enquêtes-reportages et ses articles de fond.

Pendant ces 14 années où elle occupa un emploi stable, Genevieve Elsie Alice fut remarquablement active. En 1911, elle épousa un homme d’affaires de la région, Robert Curtis Skinner, mais garda son nom de jeune fille dans sa nouvelle signature, Genevieve Lipsett-Skinner. L’année suivante, à la demande du ministère de l’Intérieur, qui avait engagé beaucoup de journalistes, elle donna des conférences partout en Grande-Bretagne et en Irlande sur les perspectives d’avenir que le Canada offrait aux femmes. À son retour, elle examina les conditions de vie de certaines de ces nouvelles Canadiennes, installées dans les quartiers pauvres du nord de Winnipeg. Alarmée par le taux de mortalité infantile élevé de la ville, elle publia des reportages dans le Winnipeg Telegram. Dans un de ces comptes rendus, paru en juillet 1913, elle décrivait les logements visités comme « des pièges mortels terriblement et merveilleusement conçus ».

Mme Lipsett-Skinner croyait, comme elle le dirait lors d’une conférence devant le Canadian Women’s Press Club, qu’« un grand nombre des handicaps des femmes et des enfants pourraient être éliminés si davantage de femmes dévouées à l’intérêt public comprenaient les lois telles qu’elles sont, et pouvaient travailler de manière constructive pour [que] des modifications appropriées [soient apportées] ». Ainsi, elle entra à la Manitoba Law School et, en 1917, obtenant son diplôme avec distinction, devint la première femme mariée de la province à détenir une licence en droit. Rien ne permet d’affirmer qu’elle exerça le droit ; elle avait probablement l’intention d’utiliser sa formation juridique pour son action politique. Un des membres fondateurs de la Political Equality League, créée en 1912, elle avait participé, le 28 janvier 1914, à la célèbre pièce The women’s parliament, dans laquelle des féministes manitobaines, dont Helen Letitia McClung [Mooney*] et les sœurs Lillian Kate Thomas [Beynon*] et Francis Marion Beynon*, parodièrent le refus du gouvernement provincial d’accorder le droit de vote aux femmes. Mme Lipsett-Skinner joua le rôle du ministre de l’économie et de l’agriculture, et, dans les coulisses, assuma les fonctions de directrice de la production. Après que les Manitobaines eurent obtenu le droit de voter aux élections provinciales et de siéger à l’Assemblée législative, en vertu d’une loi présentée par le gouvernement libéral de Tobias Crawford Norris en 1916, Mme Lipsett-Skinner trouva un nouveau défi à relever. En 1920, elle reçut l’investiture conservatrice dans la circonscription de Winnipeg, devenant ainsi une des premières Canadiennes à disputer une élection provinciale. Elle fut défaite.

À cette époque, les liens qui unissaient Mme Lipsett-Skinner à Winnipeg avaient déjà commencé à se désagréger. Elle avait perdu sa mère et ne vivait plus avec son mari. Elle trouva une nouvelle façon d’exprimer son intérêt pour la politique grâce au journalisme parlementaire. Elle fut outrée quand le Winnipeg Telegram affecta un nouveau correspondant, un homme, à Ottawa, sans même lui avoir offert le poste, en dépit du fait qu’avec sa longue expérience du journalisme et son diplôme de droit, elle était tout à fait qualifiée pour couvrir la scène politique. Le rédacteur en chef lui dit : « Vous êtes une femme, et vous ne pourriez pas devenir membre de la tribune de la presse parlementaire. » Cette réplique ne fit que consolider sa détermination à ouvrir une brèche dans les murs de ce bastion. Elle quitta le Winnipeg Telegram et, probablement au début de 1922, s’installa à Ottawa, où ses relations dans les milieux politiques proches du Parti conservateur et la présence de son frère, Robert W. Lipsett, correspondant politique bien établi, furent des atouts qu’elle utilisa dans sa lutte. Elle commença par écrire des histoires d’intérêt humain au sujet de personnalités politiques ; elle avait fait la connaissance d’un grand nombre d’entre elles à l’occasion des réceptions qu’elle donnait avec son frère dans la maison qu’ils partageaient. Elle collaborait en tant que pigiste à des journaux dans tout le Canada, mais son adhésion officielle à la tribune de la presse ne lui fut accordée que quand elle convainquit l’éditeur Robert James Cromie de la nommer correspondante parlementaire du Vancouver Sun, en 1922. D’autres femmes avaient déjà couvert la politique fédérale, mais elle fut la première à être officiellement accréditée. Son entrée à la tribune, le 8 mars 1922, coïncida avec celle d’Agnes Campbell Macphail* à la Chambre des communes. Il n’y aurait pas d’autres femmes ni à la tribune ni à la Chambre pendant de nombreuses années. En 1934, on accrocha le portrait de Mme Lipsett-Skinner dans la tribune, où il n’y avait, à l’époque, aucun autre portrait féminin. Mais la journaliste n’était déjà plus là ; en 1926, elle s’était jointe à l’équipe éditoriale du Montreal Daily Star.

Membre active du Canadian Women’s Press Club dès 1913, Genevieve Elsie Alice Lipsett-Skinner avait été présidente de la branche de Winnipeg pendant plusieurs années et présida celle de Montréal pendant quatre ans. Elle n’avait pas encore 30 ans quand elle avait proposé la création d’un fonds pour venir en aide à « tout membre infirme, souffrant ou dans le besoin, qui [était] temporairement dans une situation financière difficile ». En 1934, elle bénéficia elle-même de cette aide, lorsque des problèmes de santé l’empêchèrent de travailler. Elle mourut l’année suivante, en laissant à peine assez d’argent pour que ses compagnes de la branche montréalaise du Canadian Women’s Press Club puissent organiser un souper à sa mémoire.

Marjory Lang

BAC, R2800-0-3.— Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours, Geneal. Soc., International geneal. index.— Manitoba, Ministère du Tourisme, de la Culture, du Patrimoine, du Sport et de la Protection du consommateur, Bureau de l’état civil (Winnipeg), no 1911-005425.— E. G. Bayne, « Genevieve Lipsett-Skinner, ll.b. », Maclean’s (Toronto), 31 (1918), no 14 : 113–114.— Pierre Berton, « Hard times in the old west », Canadian Heritage (Toronto), 11, no 1 (février–mars 1985) : 11–14.— « Canadian women in the public eye : Genevieve Lipsett-Skinner », Saturday Night (Toronto), 25 juill. 1925 : 23.— M. [L.] Lang, Women who made the news : female journalists in Canada, 1880–1945 (Montréal et Kingston, Ontario, 1999).— Linda McDowell, « Some women candidates for the Manitoba legislature », Manitoba, Hist. and Scientific Soc., Papers (Winnipeg), 3e sér., no 32 (1975–1976) : 5–20.— Who’s who in western Canada [...] (Vancouver), 1911.

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Marjory Lang, « LIPSETT, GENEVIEVE ELSIE ALICE (Skinner) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/lipsett_genevieve_elsie_alice_16F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    2014
Année de la révision:    2014
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