LEMAIRE, MARIE-MARGUERITE, supérieure des Sœurs de la charité de l’Hôpital Général de Montréal, née le 14 mai 1769 à Lac-des-Deux-Montagnes (Oka, Québec), fille d’Ignace Lemaire, marchand, et de Marie-Louise Castonguay ; décédée le 12 avril 1838 à Montréal.

Marie-Marguerite Lemaire fréquenta une école tenue par les religieuses de la Congrégation de Notre-Dame, où elle fit preuve de talent. Après ses études, elle assista son père dans son commerce, et sa mère dans les travaux domestiques. Pendant ses loisirs, elle lisait principalement des hagiographies. Aussi sérieuse que talentueuse, elle aspirait à la vie religieuse. À 16 ans, elle sollicita son entrée à l’Hôtel-Dieu de Montréal, mais on la refusa à cause d’une légère infirmité qui la faisait boiter. La jeune fille réitéra sa demande auprès de l’Hôpital Général de Montréal, où on l’accepta en raison de ses nombreux talents. Elle entra au couvent le 21 novembre 1785 et prononça ses vœux perpétuels le 24 janvier 1788.

Sœur Lemaire était animée d’une ardeur au travail peu commune. Après s’être dévouée une dizaine d’années à des tâches obscures, elle devint économe de la communauté en 1798. À ce titre, elle administrait la seigneurie de Châteauguay et l’île Saint-Bernard, propriétés de l’Hôpital Général. Ainsi elle dressa elle-même le papier terrier du fief ; elle engagea ensuite un arpenteur pour en fixer officiellement les limites. Elle eut aussi à se défendre contre les Indiens de Caughnawaga (Kahnawake) qui voulaient s’emparer de l’île Saint-Bernard. Elle alla même jusqu’à les braver en arrachant leurs semences. Ils décidèrent de battre en retraite. De son côté, le seigneur de Beauharnois, par l’intermédiaire d’un agent, voulut prendre possession des îles de la Paix et il y fit même abattre des arbres. On porta cette affaire devant les tribunaux, qui donnèrent gain de cause à sœur Lemaire ; on dédommagea la communauté pour les pertes qu’elle avait subies.

Sœur Lemaire fit preuve de vigilance et de fermeté au moment de la construction du canal de Lachine. Les ingénieurs voulurent empiéter sur les terres de la communauté, situées à Pointe-Saint-Charles (Montréal), mais l’économe se rendit sur les lieux des travaux et protesta énergiquement. Les contrevenants reconnurent que les religieuses étaient dans leur droit.

Femme énergique et décidée, sœur Lemaire était aussi reconnue pour son humanité. Ainsi pendant la guerre de 1812 elle soigna un soldat britannique qui, une fois guéri, la remercia avec effusion. À un autre moment, elle sauva bravement des voyageurs en péril sur les glaces du Saint-Laurent et elle leur offrit l’hospitalité au manoir de Châteauguay.

Le 20 juillet 1821, trois jours après le décès de la supérieure, Thérèse-Geneviève Coudée*, on élut sœur Lemaire pour la remplacer. Contrairement à la coutume, elle conserva son poste d’économe. À l’instar de ses devancières, elle s’employa à recouvrer les rentes que la communauté avait en France. Elle y réussit grâce aux démarches du sulpicien Jean-Baptiste Thavenet. Mère Lemaire profita de cette rentrée de fonds pour agrandir l’Hôpital Général et surveilla elle-même les travaux. De plus, elle fit apporter des améliorations importantes à la seigneurie de Châteauguay. En 1823, à la demande des sulpiciens qui s’engageaient à payer une partie des frais d’entretien, elle accepta d’héberger 40 orphelines irlandaises. C’est aussi pendant son supériorat que la communauté accueillit des femmes écossaises et irlandaises.

Le 3 septembre 1833, Marie-Marguerite Lemaire démissionna de son poste de supérieure à cause de problèmes de santé ; Marguerite Beaubien la remplaça. Mère Lemaire passa les cinq dernières années de sa vie à l’infirmerie de l’hôpital, où elle mourut le 12 avril 1838. Elle laissa l’image d’une femme intrépide, attentive aux conditions de vie des religieuses et remplie de compassion pour les miséreux. Elle avait grandement contribué à améliorer les conditions matérielles de la communauté.

Huguette Lapointe-Roy

Arch. des Sœurs Grises (Montréal), Dossier de sœur M.-M. Lemaire, corr. ; hist. personnelle, doc. 3, 5, 7–8 ; post mortem, doc. 2 ; Reg. des baptêmes et sépultures de l’Hôpital Général de Montréal.— [Albina Fauteux et Clémentine Drouin], l’Hôpital Général des Sœurs de la charité (Saurs Grises) depuis sa fondation jusqu’à nos jours (3 vol. parus, Montréal, 1916–  ).

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Huguette Lapointe-Roy, « LEMAIRE, MARIE-MARGUERITE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 7, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/lemaire_marie_marguerite_7F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 7
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1988
Année de la révision:    1988
Date de consultation:    28 novembre 2024