GASTÉ, MARIE-JOSEPH-EUGÈNE-ALPHONSE (à la naissance, il reçut les prénoms d’Eugène-Alphonse), prêtre, oblat de Marie-Immaculée et missionnaire, né le 11 octobre 1830 à Andouillé, France, fils de René Gasté, meunier, et de Renée Benoiste ; décédé le 27 novembre 1919 à Laval, France.
Marie-Joseph-Eugène-Alphonse Gasté termina ses études au lycée de Laval en 1851 et entra au grand séminaire du Mans. Il enseigna au collège de Château-Gonthier en 1854–1855 et fut ordonné prêtre le 25 mars 1855 à Sées. De 1855 à 1860, il fut vicaire à Bais, dans le diocèse de Laval. Remué par les appels de Mgr Vital-Justin Grandin* en faveur des missions du diocèse de Saint-Boniface, dans Rupert’s Land, il quitta sa confortable position pour entrer chez les oblats le 24 avril 1860. Il termina son noviciat à Saint-Norbert (Manitoba) et prononça ses vœux devant Mgr Alexandre-Antonin Taché* le 31 mai 1861.
Gasté aida ensuite le père Valentin Végréville à fonder la mission de Saint-Pierre près du nouveau poste de la Hudson’s Bay Company, Lac-du-Brochet House (Brochet) sur le lac du Caribou. Mgr Taché, qui avait lancé le travail missionnaire à cet endroit en 1847, était impatient de le consolider car une mission anglicane était sur le point d’être fondée. Gasté passerait 40 ans à Saint-Pierre et gagnerait le titre de « Moïse des Chipewyans ». Il parcourait d’énormes distances pour se rendre aux campements des Chipewyans appelés Mangeurs-de-caribou, qui vivaient au nord jusque dans la toundra, et exerçait aussi son ministère auprès des Chipewyans et des Cris du Sud. Son champ d’action était vaste : il allait du lac Dubawnt (Territoires du Nord-Ouest) au lac Winnipeg. Son travail lui tenait tellement à cœur que, après s’être rendu en France en 1893 à titre de délégué au chapitre général des oblats, il rentra immédiatement, sans prendre de vacances.
En 1868, après sept mois d’épuisants voyages avec les Chipewyans, Gasté devint le premier oblat à entrer en contact avec les Inuit de ce qui est maintenant le nord du Manitoba. À la consternation des fonctionnaires de la Hudson’s Bay Company au fort Churchill (près de Churchill), il les convainquit de faire de la traite à Lac-du-Brochet. Le maintien des relations avec les Inuit amènerait le père oblat Arsène-Louis Turquetil à entreprendre son travail auprès d’eux, sous la tutelle de Gasté ; Turquetil deviendrait en 1931 le premier évêque missionnaire de ces Inuit.
En 1868, la mission de Saint-Pierre fut intégrée au vicariat de la Saskatchewan dirigé par Grandin. Trois ans après, cette division ecclésiastique des oblats deviendrait le diocèse de Saint-Albert. Jugeant que Saint-Pierre posait plus de problèmes que ses autres missions – faible nombre de conversions, difficultés de transport, isolement, impossibilité d’y faire de l’agriculture –, Grandin voulut la fermer en 1870, mais céda aux pressions de Gasté, qui tenait à ce qu’elle reste ouverte. Cette décision fut un facteur de stabilité et l’inauguration d’une petite école amena un plus grand nombre de Chipewyans à embrasser le catholicisme, ce qui assura la permanence de la mission. En 1891, par suite d’une modification du territoire ecclésiastique, la mission de Saint-Pierre passerait au vicariat apostolique de la Saskatchewan (futur diocèse de Prince Albert), sous l’autorité de l’évêque Albert Pascal.
Gasté envoya ses assistants bâtir des chapelles dans toute la partie sud de son vaste territoire missionnaire, au lac Pélican (Manitoba), à The Pas et à Grand Rapids ainsi qu’à Cumberland House (Saskatchewan). En tant qu’initiateur de ces établissements éloignés,. il favorisa énormément l’essor de l’Église catholique dans ce qui est maintenant le nord du Manitoba et de la Saskatchewan. Il empêcha la fermeture imminente du poste de traite de Lac-du-Brochet en 1897 en y faisant venir par bateau des marchandises provenant d’un commerçant indépendant de Prince Albert (Saskatchewan) et en veillant à ce qu’un Métis les vende, ce qui força la Hudson’s Bay Company à garder son poste ouvert pour ne pas perdre ses clients. En 1901, au terme de ses longues années de vie missionnaire, Gasté obtint l’assurance que la Hudson’s Bay Company garderait son poste ouvert et que les évêques maintiendraient la mission, malgré les solides arguments qui s’y opposaient sur le plan économique.
Installé à Prince Albert en 1901, Gasté fut supérieur des oblats et maître des novices, aumônier des Sœurs de Notre-Dame de Sion, vicaire général en 1903 et administrateur du vicariat en 1905. À l’occasion du cinquantenaire de son ordination, qu’il célébra à Prince Albert en 1905, les Chipewyans, à qui il s’était dévoué si longtemps, lui rendirent hommage.
Marie-Joseph-Eugène-Alphonse Gasté rentra en France en 1908 pour vivre en compagnie de sa sœur. Il exerça son ministère à Laval de 1910 jusqu’à son décès en 1919.
On trouve aux Arch. Deschâtelets, oblats de Marie-Immaculée (Ottawa), des lettres (originaux et copies) de Marie-Joseph-Eugène-Alphonse Gasté dans le dossier Gasté et dans la correspondance de divers évêques avec qui il a exercé son ministère ; on consultera plus particulièrement les documents sous la cote HEB 6255.A45C, nos 1, 20. Il existe aussi d’autres documents de correspondance aux Arch. de l’archevêché de Saint-Boniface, Manitoba.
Arch. départementales, Mayenne (Laval, France), État civil, Andouillé, 14 oct. 1830.— Prince Albert Roman Catholic Diocesan Arch. (Prince Albert, Saskatchewan), Albert Pascal corr., Pascal à Henri Grandin, 9 juill. 1908, 31 juill. 1909.— Gaston Carrière, Dictionnaire biographique des oblats de Marie-Immaculée au Canada (4 vol., Ottawa, 1976–1989), 2 : 64s.— Fêtes jubilaires des R.R. P.P. Gasté et Moulin, le 26 juillet 1905 à Prince-Albert, Sask. (s.l., s.d. ; exemplaire conservé aux Arch. Deschâtelets).— Martha McCarthy, To evangelize the nations : Roman Catholic missions in Manitoba, 1818–1870 (Winnipeg, 1990).— Missions de la Congrégation des missionnaires oblats de Marie Immaculée (Marseille, et autres lieux), 1 (1862)–44 (1906), plus particulièrement 9 (1870) : 333–355, et 50 (1912) :285–288.
Martha McCarthy, « GASTÉ, MARIE-JOSEPH-EUGÈNE-ALPHONSE (Eugène-Alphonse) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 14, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/gaste_marie_joseph_eugene_alphonse_14F.html.
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Auteur de l'article: | Martha McCarthy |
Titre de l'article: | GASTÉ, MARIE-JOSEPH-EUGÈNE-ALPHONSE (Eugène-Alphonse) |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 14 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1998 |
Année de la révision: | 1998 |
Date de consultation: | 28 novembre 2024 |