Fortier, Achille (baptisé Antonio-Achille), professeur, compositeur, ténor et fonctionnaire, né le 23 octobre 1864 à Saint-Clet, Bas-Canada, fils de Léonard-Agapit Fortier, médecin, et d’Émérante Bonin ; le 2 décembre 1893, il épousa à Montréal Marie-Louise Lefebvre (décédée le 24 mai 1909), puis le 6 juin 1910, à Aylmer (Gatineau, Québec), Marie-Jeanne Lavoie, et de ce mariage naquirent deux enfants ; décédé le 19 août 1939 à Montréal.
Achille Fortier s’initie à la musique auprès de l’abbé Stanislas-Alfred Sauvé, professeur au petit séminaire de Sainte-Thérèse, situé au nord-ouest de Montréal. De 1883 à 1885, à Montréal, il suit des cours de chant et d’harmonie avec Guillaume Couture* et des leçons de piano avec Dominique Ducharme. Il se rend en France à l’automne de 1885. Il prend part aux cours de composition d’André Gédalge, qui le prépare pour le Conservatoire de Paris. En 1887, il est candidat au concours musical de la ville de Senlis, où il obtient le prix du jury. En novembre 1889, il devient le premier Canadien admis comme élève régulier au Conservatoire de Paris, dans la classe de fugue et de composition d’Ernest Guiraud, où il a notamment comme condisciples Alfred Bachelet et Victor Staub, futurs compositeurs. Malgré les indications fournies par des ouvrages canadiens, aucune preuve écrite ne permet de corroborer l’information selon laquelle Fortier se serait aussi inscrit, au Conservatoire de Paris, en classe d’harmonie avec Théodore Dubois et en classe de chant avec Romain Bussine. Pour des raisons familiales, Fortier doit revenir au Canada avant la fin de sa première année scolaire.
De retour à Montréal en 1890, Fortier enseigne le chant, l’harmonie et le contrepoint à l’asile Nazareth jusqu’en 1906, fonction qu’il exercera de nouveau de 1920 à 1923. Il donne des cours de chant et de composition au couvent des Religieuses du Sacré-Cœur. De 1895 à 1901, il prend en charge les classes de chant et d’harmonie au conservatoire de la Société artistique canadienne. Il est notamment le professeur d’Édouard LeBel et de Joseph Saucier*, qui deviendront chanteurs, et de Frédéric Pelletier, futur critique musical.
Fortier s’est produit pour la première fois comme ténor le 29 mars 1891 à l’église Notre-Dame, à Montréal, quand, sous la direction de Couture, il interprète la Messe solennelle [...] d’Ambroise Thomas. Occasionnellement jusqu’en 1901, il donnera des récitals ou participera à des concerts. En 1892, pour moins d’une année, il est maître de chapelle à l’église Notre-Dame. Le 29 novembre 1893, sous la direction de Couture, l’Association Hall présente un concert vocal et instrumental entièrement consacré à 16 des œuvres de Fortier. Quelques jours plus tard, Fortier épouse son élève de chant, Marie-Louise Lefebvre. Le 22 décembre 1896, à l’église Notre-Dame, il dirige la présentation d’une messe pour orgue, orchestre et quatre voix masculines, qu’il a composée et qui est partiellement publiée à Montréal dans l’Art musical de décembre.
Vers 1893, Fortier a publié, à Montréal, les arrangements de 20 chansons populaires du Canada. Il est d’ailleurs l’un des premiers, avec Alfred Laliberté, à harmoniser des chansons de tradition orale. Sept années plus tard, il fait paraître, dans la même ville et à Toronto, Hæc dies : chœur pascal pour trois voix égales [...]. Entre 1890 et 1900, il a aussi composé Marche solennelle et Valse, pour orchestre, ainsi que Méditation, pour violoncelle et piano. En 1901, il aurait, semble-t-il, mis le feu à une partie de son œuvre.
La relation entre Fortier et Couture a parfois été houleuse. À Montréal, dans le Monde du 10 et du 31 mars 1894 et dans l’Art musical de mai 1897, Fortier (qui signe Cinq-Sens dans le premier périodique et Dulciane dans l’autre) s’insurge contre une des méthodes de Couture qui consiste à apposer sa signature à côté de celle des compositeurs d’œuvres vocales latines dont il a modifié les paroles. Une fois que Couture démasque celui qui se cache derrière ces pseudonymes, il fait tout pour déstabiliser Fortier.
Fortier a adhéré à la franc-maçonnerie en 1896 en devenant membre de la Cœurs Unis Lodge No. 45. En avril de cette année, il s’inscrit au comité qui demande la création de la loge L’Émancipation [V. Godfroy Langlois*].
De 1900 à 1924, Fortier assume la fonction de traducteur du hansard pour le gouvernement fédéral à Ottawa. Il partage son temps entre les activités de la Chambre des communes, les cours de musique qu’il donne à Montréal au moment des vacances parlementaires et la composition, à laquelle il s’adonne pendant ses loisirs. Le 6 juin 1910, il épouse Marie-Jeanne Lavoie, avec qui il a deux enfants.
En 1925, à Montréal, Fortier est membre des jurys du prix d’Europe et, du 24 au 28 mai 1928, à Québec, du Festival de la chanson et des métiers du terroir. En 1926, l’université de Montréal lui décerne un doctorat honorifique en musique. Deux années plus tard, Fortier harmonise le chant patriotique Ô Canada, mon pays, mes amours, écrit par sir George-Étienne Cartier*. Le 29 avril 1937, son chalet situé à Sainte-Scholastique (Mirabel) est la proie d’un incendie : en plus d’une partie de ses œuvres, Fortier perd ainsi le manuscrit du dictionnaire juridique bilingue sur lequel il travaillait.
Achille Fortier meurt le 19 août 1939 des suites d’un cancer dont il souffrait depuis plusieurs années. Une rue est nommée en son honneur dans le quartier Pointe-aux-Trembles, à Montréal, en 1983. Trois années plus tard, un ensemble vocal et instrumental qui s’intéresse au répertoire québécois du xixe siècle et de la première moitié du xxe siècle adopte son nom. Le 22 août 1939, Pelletier a écrit dans le Devoir : « J’ai eu l’honneur d’être l’élève d’Achille Fortier pendant plusieurs années, et, si je suis quelque chose, je le dois à son sens pédagogique aigu et à sa très haute idée de ce qu’est l’art de la musique. »
Plus de 30 partitions originales d’Achille Fortier sont conservées à BAnQ-CAM, dans le fonds Claude Champagne (MSS345). En 1989, Liette Turner (Juneau), Erik Oland et Réjean Coallier ont interprété dix mélodies de Fortier, qui figurent sur le CD le Canada romantique, paru à Montréal la même année. En 1994, Coallier a publié le recueil de partitions musicales Douze mélodies pour voix et piano (Saint-Nicolas [Lévis, Québec]), qui comprend notamment Mon bouquet (1892), d’après un poème de Louis Fréchette*, Impromptu (Ottawa, 1915) et Orgueil (Ottawa, 1915), d’après des poèmes de Charles Gill*.
BAnQ-CAM, CE601-S1, 2 déc. 1893 ; CE601-S17, 23 oct. 1864 ; CE606-S22, 18 août 1834, 8 janv. 1859.— FD, Saint-Paul (Aylmer [Gatineau, Québec]), 6 juin 1910, 25 août 1912, 14 juill. 1915.— Le Devoir, 21–22 août 1939 ; 24 févr. 1990.— Le Monde (Montréal), 17 mars 1894.— Lucie Boulianne, « Achille Fortier (1864–1939) : espoirs et désillusions d’un compositeur au tournant du siècle », ARMuQ, Cahiers (Québec), no 12 (avril 1990) : 54–61.— Historica Canada, « l’Encyclopédie canadienne » : www.encyclopediecanadienne.ca/fr (consulté le 18 août 2015).— Roger Le Moine, Deux loges montréalaises du Grand Orient de France (Ottawa, 1991).— L.-P. Morin, Papiers de musique (Montréal, 1930).
Jean-Nicolas De Surmont, « FORTIER, ACHILLE (baptisé Antonio-Achille) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/fortier_achille_16F.html.
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Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 2017 |
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