ELDER, WILLIAM, ministre presbytérien, journaliste et homme politique, né le 22 juillet 1822 à Malin (comté de Donegal, République d’Irlande), décédé à Saint-Jean, Nouveau-Brunswick, le 23 juillet 1883 ; sa femme et deux filles lui survécurent.

William Elder reçut une excellente formation théologique au Belfast College, aux universités de Glasgow et d’Édimbourg et au New College d’Édimbourg. La haute qualité littéraire de ses écrits et de ses discours témoigna par la suite de l’instruction qu’il avait reçue. Elder se distingua grandement au cours de ses études : il brilla particulièrement en métaphysique et en études classiques. Ainsi préparé à devenir ministre de l’Église libre presbytérienne, il arriva au Nouveau-Brunswick à titre de missionnaire. En 1853, il occupa pendant quelque temps la chaire de l’église presbytérienne de Saint-Jean et, au début de 1854, fut appelé au pastorat de l’église presbytérienne à St Stephen, où il demeura jusqu’en 1863. Toutefois, ses inclinations littéraires le conduisirent bientôt à faire du journalisme confessionnel et, en mars 1856, il avait fondé le Colonial Presbyterian and Protestant Journal, qu’il continua de publier et de diriger après son retour à Saint-Jean en 1863. Elder cessa alors d’exercer ses fonctions de ministre, bien qu’il prêchât de temps en temps dans son ancienne paroisse à Saint-Jean.

Conscient qu’à l’ère de la confédération, on pouvait exercer plus d’influence dans le journalisme profane que dans le journalisme confessionnel, Elder fonda à Saint-Jean, le 1er mai 1865, le Morning Journal qui parut trois fois par semaine. En qualité de propriétaire et de directeur du journal, Elder allia ses grandes connaissances à sa compétence remarquable de journaliste ; dans ses éditoriaux pleins de dignité, mais néanmoins énergiques, il appuyait la confédération au moment même où la popularité des partisans de ce projet atteignait son plus bas niveau dans la province. Tout en s’opposant à Samuel Leonard Tilley* au sujet du Western Extension Railway destiné à relier Saint-Jean au Maine, le Morning Journal joua un rôle important dans la victoire de Tilley et de la cause de la confédération sur Albert James Smith, lors des élections décisives de juin 1866 au Nouveau-Brunswick. Dès 1867, commentant les éditoriaux « osés, sérieux et cohérents » d’Elder et « la culture et le raffinement de ses goûts », Henry James Morgan* notait que celui-ci se plaçait déjà « au premier rang parmi les journalistes d’Amérique britannique ».

Le 2 juillet 1869, le Morning Journal d’Elder fusionna avec le Morning Telegraph (Saint-Jean), qui paraissait trois fois par semaine et appartenait à John Livingston, pour former le St. John Daily Telegraph and Morning Journal ; Livingston en fut le propriétaire et Elder le rédacteur en chef. En même temps, le Colonial Presbyterian, dont Elder était propriétaire, en fit autant avec le Presbyterian Advocate (Saint-Jean) en vertu de dispositions similaires. En 1871, Elder acheta la part que Livingston possédait de ces deux journaux ; il demeura propriétaire et directeur du Presbyterian Advocate jusqu’à la disparition de ce journal en 1876, et du St. John Daily Telegraph and Morning Journal (dont le titre fut abrégé en celui de Daily Telegraph en septembre 1873) jusqu’à sa mort. Sous son habile administration, le Daily Telegraph acquit une importance sans précédent dans les Maritimes. Le tirage du journal atteignit plus que le double de celui de n’importe quel autre quotidien au Nouveau-Brunswick, et le Weekly Telegraph égala le tirage de ses trois principaux concurrents réunis aux Maritimes. Le Presbyterian Advocate et le Daily Telegraph tiraient ensemble à 20 000 exemplaires chaque semaine, ce qui représentait la production la plus considérable pour un organe de publicité publié au Canada, à l’est de Montréal.

On peut attribuer en grande partie le succès du Telegraph à la réorganisation complète de la rédaction par Elder qui fit de James Hannay* son adjoint à la direction, de 1872 à 1883 ; Hannay allait devenir rédacteur en chef du Telegraph entre 1893 et 1901 et l’historien le plus important du Nouveau-Brunswick avant la première guerre mondiale. Ce fut cependant surtout la personnalité de William Elder et sa direction énergique et cohérente qui, selon le Globe de Toronto, firent du Daily Telegraph l’un des « journaux les plus entreprenants, les mieux dirigés et les plus influents du Dominion », entre 1871 et 1883.

Dans les éditoriaux bien étayés et consciencieux qu’il rédigea pour le Daily Telegraph sur la politique fédérale, Elder appuya chaleureusement sir John Alexander Macdonald*, Tilley et les conservateurs jusqu’à ce qu’il fût désillusionné par le scandale du Pacifique en 1873. Par la suite, il fit concorder les positions du Telegraph avec celles des libéraux d’Alexander Mackenzie* en matière de politique fédérale, mais soutint que la politique provinciale devait être tout à fait séparée de la politique fédérale. Pendant la controverse portant sur les écoles du Nouveau-Brunswick, au début des années 1870, Elder se fit un ferme défenseur du système scolaire gratuit et non confessionnel qui fut instauré en janvier 1872 malgré l’opposition des catholiques. Sur le plan local, le Telegraph, animé d’un zèle patriotique ardent, consacra beaucoup d’attention, en particulier, au progrès commercial, industriel, social et intellectuel de Saint-Jean et, de façon générale, à celui du Nouveau-Brunswick. Les éditoriaux d’Elder sur ces sujets alliaient un style littéraire clair et une logique circonspecte à une noble probité intellectuelle.

Elder fit son entrée en politique lors des élections fédérales de 1872, comme candidat conservateur de la ville et du comté de Saint-Jean. Les députés élus furent Isaac Burpee et Acalus Lockwood Palmer, mais la lutte eut peu de conséquences politiques car tous les candidats se présentèrent comme conservateurs modérés. Sur la scène provinciale, l’appui chaleureux que lui accorda le Daily Telegraph contribua beaucoup à l’adoption du projet de loi sur les écoles du Nouveau-Brunswick par le gouvernement de George Luther Hatheway* en mai 1871. Lorsque la mort de Joseph Coram laissa vacant le siège du comté de Saint-Jean, Elder fut élu à l’Assemblée provinciale lors d’une élection partielle, le 6 novembre 1875. Il fut réélu en 1878 et en 1882. Bien qu’avant 1883 il n’y eût pas de ligne de démarcation claire entre les partis en politique provinciale au Nouveau-Brunswick, on considérait généralement Elder comme un partisan du gouvernement de George Edwin King* ; grâce à l’influence des éditoriaux du Telegraph et à sa brillante éloquence à l’Assemblée, Elder devint l’un des plus ardents défenseurs du gouvernement formé par John James Fraser* en 1878. Après que Fraser et William Wedderburn eurent démissionné respectivement de leur poste de premier ministre et de secrétaire de la province avant les élections générales de juin 1882, le gouvernement fut remanié sous la direction de Daniel Lionel Hanington et de Pierre-Amand Landry*. Elder fut indigné d’en avoir été exclu. Comptant sur l’appui des 22 députés conservateurs élus en juin 1882 pour demeurer au pouvoir, le nouveau gouvernement ne tarda pas à faire face à une opposition composée des partisans les plus libéraux des anciens gouvernements de King et de Fraser, et dont les membres les plus en vue étaient Elder et Andrew George Blair*. Quand le gouvernement de Hanington et de Landry fut forcé de démissionner à la suite d’un vote de défiance le 24 février 1883, Blair forma un cabinet libéral le 3 mars suivant ; il s’agissait du premier gouvernement formé de membres se réclamant d’une « formation politique » distincte au Nouveau-Brunswick depuis la Confédération. Elder fut nommé secrétaire de la province, président de la Chambre d’agriculture et un des commissaires de l’asile d’aliénés de la province. Il mourut moins de cinq mois plus tard mais, pendant le peu de temps où il occupa ces fonctions, il se révéla un administrateur compétent et assidu.

Tout en faisant du journalisme et de la politique active, Elder fut élu membre du Saint John Grammar School Board et du Saint John Board of Trade ; il représenta ce dernier organisme à plusieurs reprises à l’assemblée annuelle de la Chambre de commerce de la puissance. Il se considérait aussi comme membre du milieu des affaires de Saint-Jean et fit partie du conseil d’administration de la Saint John Cotton Company ; il fut le principal organisateur de la Dominion and Loyalist Centennial Exhibition tenue à Saint-Jean en octobre 1883. Il est possible que les efforts soutenus qu’il fournit en qualité de président du bureau de l’exposition aient été pour quelque chose dans sa mort survenue quelques mois avant l’ouverture de celle-ci. Entre avril 1867 et octobre 1872, il avait rédigé de nombreux articles dans le Stewart’s Quarterly (Saint-Jean), une des meilleures revues littéraires du Canada pendant la période qui suivit immédiatement la Confédération. Dans le domaine de l’éducation, Elder contribua surtout à la fondation de la Fredericton Normal School à la fin des années 1870 et il prit souvent la parole lors de collations des grades universitaires. Les discours qu’il prononça alors, dont plusieurs furent publiés, témoignaient d’une éloquence raffinée et pleine d’érudition. En reconnaissance des services qu’il avait rendus à l’éducation dans la province, l’University of New Brunswick lui décerna un doctorat honorifique endroit en juin 1883.

La mort subite d’Elder plongea tout le Nouveau-Brunswick dans un grand deuil et suscita des éloges funèbres à travers le Canada. En qualité de membre du clergé presbytérien, d’orateur de premier plan à l’Assemblée du Nouveau-Brunswick, de 1875 à 1883, et de membre éminent du gouvernement de Blair, pendant quelque temps, il avait acquis une grande renommée, mais il était surtout connu pour sa brillante carrière de journaliste, le plus influent du Nouveau-Brunswick après la Confédération. Le digne propriétaire et directeur du Daily Telegraph de Saint-Jean avait été, comme le nota le Dominion annual register dans un commentaire sur le dévouement éclairé d’Elder à la chose publique et sur son dynamisme indomptable, « l’un des journalistes les plus compétents et les plus estimables du Dominion ».

Murray Barkley

William Elder est l’auteur de Meliora : an oration delivered before the « Alumni » of Mount Allison Wesleyan College, Sackville, on the 1st of June, 1880 ([Saint-Jean, N.-B., 1880]), et de The university : medieval and modern ; an oration, delivered at the encœnia of the University of New Brunswick, on the 21st of June, 1871 (Saint-Jean, 1871).

Colonial Presbyterian and Protestant Journal (St Stephen, N.-B., et Saint-Jean), mars 1856-juin 1869.— Daily Sun, 24, 27 juill. 1883.— Daily Telegraph, 2 juill. 1869–27 juill. 1883.— Globe, 25 juill. 1883.— Morning Journal (Saint-Jean), 1er mai 1865–30 juin 1869.— Presbyterian Advocate (Saint-Jean), 1869–1876.— Stewart’s Quarterly (Saint-Jean), avril 1867–oct. 1872.— CPC, 1883.— Dominion annual register, 1883.— Harper, Hist. directory.— W. G. MacFarlane, New Brunswick bibliography : the books and writers of the province (Saint-Jean, 1895).— Morgan, Bibliotheca Canadensis.— Hannay, Hist. of N.B.

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Murray Barkley, « ELDER, WILLIAM (1822-1883) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 11, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/elder_william_1822_1883_11F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 11
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1982
Année de la révision:    1982
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