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BOMPAS, WILLIAM CARPENTER, ministre, missionnaire et évêque de l’Église d’Angleterre, né le 20 janvier 1834 à Londres, fils de Charles Carpenter Bompas, avocat, et de Mary Steele Tomkins ; le 7 mai 1874, il épousa Charlotte Selina Cox*, et ils n’eurent pas d’enfants ; décédé le 9 juin 1906 à Carcross, Yukon.
William Carpenter Bompas naquit à Londres, dans le quartier de Regent’s Park, au sein d’une famille baptiste qui allait compter huit enfants. Il perdit son père à l’âge de dix ans. Probablement par nécessité, il fut instruit à la maison. C’était, dit-on, un enfant tranquille, qui préférait le dessin et le jardinage à des occupations plus actives. Il reçut le baptême à l’âge de 16 ans et, deux ans plus tard, se joignit à son frère George Cox à Londres, dans un cabinet de solicitors. Cependant, il n’allait pas faire carrière dans le droit. En 1858, il traversa une espèce de dépression et de crise spirituelle ; il quitta son travail et fut confirmé en 1859 au sein de l’Église d’Angleterre. Plus tard dans l’année, le 18 décembre, on l’ordonna diacre. Nommé vicaire à Sutton-in-the-Marsh, dans le Lincolnshire, il y demeura jusqu’en 1862, après quoi il exerça la même fonction pendant de courtes périodes dans le Nottinghamshire et dans d’autres coins du Lincolnshire.
C’est à cette époque que Bompas commença à s’intéresser aux missions d’Extrême-Orient et s’informa à ce sujet auprès de la Church Missionary Society. Celle-ci accueillit ses demandes avec tiédeur, attitude que son biographe Hiram Alfred Cody* attribue, à tort ou à raison, au fait qu’on le jugeait « un peu trop vieux pour se mesurer aux difficultés des langues orientales ». Puis, en mai 1865, Bompas entendit, à Londres, un sermon de David Anderson*, ex-évêque de Rupert’s Land. Anderson réclamait un volontaire pour remplacer le missionnaire Robert McDonald qui couvrait à la mission du Nord-Ouest américain de la Church Missionary Society, dans le district du Yukon, et qui était malade. Dès lors, les événements se précipitèrent : Bompas posa sa candidature, que la société agréa, et le successeur d’Anderson, l’évêque Robert Machray l’ordonna prêtre le 25 juin.
Cinq jours plus tard, Bompas se mettait en route. Ce n’était, pour lui, que le premier d’une série de voyages épiques. Contrairement à ce qui se faisait d’habitude, il ne s’organisa pas pour se rendre dans le Nord avec le convoi de bateaux de la Hudson’s Bay Company, car il était bien résolu à ne pas perdre de temps. Il comptait sur sa chance pour trouver sur place des moyens de transport. Au début d’août, à la colonie de la Rivière-Rouge, il profita de ce qu’une flottille se rendait à un point situé sur le lac Winnipeg, puis fut cueilli par un bateau de la Hudson’s Bay Company qui passait par là. Un collègue missionnaire nota avec quelque émerveillement son arrivée à The Pas : « C’est un type on ne peut plus zélé, car il est venu sans ses bagages, et sans les vêtements nécessaires pour affronter le froid. » Restant sourd à ceux qui lui faisaient valoir que la saison avançait, Bompas loua un canot et les services de guides métis jusqu’au moment du gel, puis poursuivit son chemin en raquettes dans le district du Mackenzie. Comme rien n’avait annoncé sa venue, ce fut avec un certain étonnement que William West Kirkby, missionnaire de la Church Missionary Society au fort Simpson (Fort Simpson, Territoires du Nord-Ouest), le vit arriver au poste le jour de Noël 1865, de fort bonne humeur.
Entre-temps, Robert McDonald s’était remis, si bien qu’il n’était plus nécessaire de le remplacer au Yukon. Bompas reçut donc l’ordre de travailler comme prédicateur itinérant. Il devait visiter les principaux postes de la Hudson’s Bay Company dans les districts d’Athabasca et du Mackenzie et en profiter pour apprendre quelques-unes des langues nordiques. Au bout de trois ans, il eut finalement l’occasion de se rendre au fort Youcon (Fort Yukon, Alaska) ; de là il fit un certain nombre de visites missionnaires aux Inuit du delta du Mackenzie. Puis, au début de l’été de 1873, il apprit que la Church Missionary Society avait décidé de subdiviser l’immense diocèse de la terre de Rupert, de créer le diocèse d’Athabasca dans le Nord-Ouest, et de l’en nommer évêque.
La nouvelle n’enchanta pas Bompas. Pénétré de principes évangéliques, il n’était pas à son aise avec « les croix et les poses » ainsi qu’avec les cérémonies qui n’étaient pas d’une simplicité extrême, et pour lui, l’épiscopat était une institution « romaniste ». Il se rendit donc en Angleterre dans l’intention, semble-t-il, de refuser sa nomination. Ses collègues du clergé le convainquirent que, étant donné la puissance croissante de la mission catholique dans l’Ouest [V. Vital-Justin Grandin], il fallait une organisation diocésaine pour consolider la mission du Nord-Ouest américain. Le 3 mai 1874, Bompas fut donc sacré évêque d’Athabasca en l’église St Mary de Londres. Il épousa sa cousine Charlotte Selina Cox quatre jours plus tard et retourna presque immédiatement au fort Simpson.
Le nouveau diocèse était vaste. Bien que Bompas ait pu compter sur le soutien d’un nombre croissant de prêtres avec leurs épouses, les finances posaient un problème constant, et les missionnaires vivaient et voyageaient dans des conditions difficiles. De plus, la nature du travail missionnaire suscitait des tensions. Dans ses premières années, en raison de son évangélisme, Bompas privilégia les conversions individuelles et la prédication de l’évangile aux « païens » plutôt que de favoriser la création d’écoles, d’hôpitaux et d’autres services sociaux ou l’instauration de profonds changements culturels chez les peuples autochtones. Puis, en 1877, la Church Missionary Society lui demanda de servir de médiateur dans un différend entre l’évêque George Hills* et le missionnaire William Duncan* à Metlakatla, en Colombie-Britannique. Après avoir visité la communauté modèle de Duncan, Bompas acquit la conviction que prêcher ne suffisait pas et que, pour répandre l’œuvre de Dieu, il fallait aussi en faire voir les « fruits ». Il conçut donc des plans en vue d’établir des fermes modèles à Fort Dunvegan (Dunvegan) et au fort Vermillon, dans le district de la rivière de la Paix. Les travailleurs missionnaires George Garrioch et E. J. Lawrence allèrent réaliser ce projet grâce à des fonds versés par des anglicans canadiens et par la Society for Promoting Christian Knowledge. La Irene Training School du fort Vermillon, première école professionnelle du Nord, accueillit un élève en juillet 1880 ; cinq autres se présentèrent plus tard dans l’année.
Bompas continuait de parcourir le Nord, mais il trouvait que les devoirs de sa charge pesaient terriblement sur sa propre santé et sur celle de sa femme, qui devait s’absenter périodiquement pour suivre des traitements médicaux et se reposer. En 1883, le synode provincial de la terre de Rupert accepta de subdiviser le diocèse, et en 1884, Bompas devint évêque de la partie septentrionale, le nouveau diocèse du fleuve Mackenzie. Ce dernier serait subdivisé à son tour en 1891, et Bompas deviendrait alors évêque de Selkirk (aujourd’hui diocèse du Yukon). Son siège épiscopal se trouverait à Forty Mile, sur le fleuve Yukon.
Même depuis qu’il était devenu évêque, Bompas continuait de faire du travail missionnaire : il prêchait, baptisait, enseignait à lire aux jeunes et aux adultes et voyageait beaucoup. À sa manière, il se mit à défendre ce qu’il percevait comme les meilleurs intérêts des peuples autochtones face à la présence croissante des Blancs dans le Nord – présence dont la pêche à la baleine par les Américains au large de l’île Herschel et la ruée vers l’or du Klondike sont des exemples. Correspondant régulier de John Christian Schultz* et d’autres hommes politiques, il encourageait une prise de conscience du Nord devant l’apathie notable du Canada. En outre, il consacrait de longues heures à l’étude des langues nordiques et traduisit un grand nombre d’hymnes, de prières et de textes bibliques dans la langue des Esclaves, des Castors et des Tukudhs (Kutchins de l’Est ou Loucheux). Toutefois, il rejetait catégoriquement l’écriture syllabique inventée par James Evans*, car il estimait qu’elle ne rendait pas bien les nuances. Ses rapports à la Church Missionary Society et deux de ses livres devinrent très connus dans les cercles anglicans, et lui-même fut une espèce de saint et de héros pour plusieurs générations de Canadiens et d’Anglais. Dévoué à son travail presque jusqu’à l’obsession, il raconta en 1903 dans le Who’s who de Londres qu’il consacrait ses loisirs aux « études syriaques ou [à la] tenue d’écoles ». Après son sacre, il quitta le Nord une seule fois, soit en 1904, pour se rendre à une assemblée de la maison provinciale des évêques à Winnipeg. Un grand ralliement missionnaire eut lieu en son honneur.
Pour bien des non-anglicans, Bompas était un homme difficile et excentrique. Perplexe, le père Émile-Jean-Baptiste-Marie Grouard disait de lui qu’il était un « mystère ». « S’il est dans la bonne foi, notait l’oblat, c’est presque un saint. Si non – il est vraiment un diable. » II ne suscitait pas non plus l’enthousiasme chez les autochtones du Nord. La mission anglicane ne parvint jamais à attirer un grand nombre de convertis, sauf parmi les Loucheux, chez qui Robert McDonald œuvrait. Bien que ce rejet ait eu des motifs divers et complexes, on peut sans doute l’attribuer en partie au manque de respect que Bompas avait pour la culture indigène et à la rigidité de ses attentes à l’égard des convertis éventuels. Il ne pouvait accepter que la Church Missionary Society dicte de confier le plus tôt possible des tâches d’évangélisation à des autochtones. Le « manque d’intelligence et de civilisation » était tel parmi eux, soutenait-il, que « le progrès [devait] venir de l’extérieur ». En conséquence, aucun ministre autochtone ne fut recruté ni ordonné pendant son épiscopat. Bompas lui-même reconnaissait que sa mission ne remportait « qu’un succès médiocre ». Il en blâmait les Amérindiens, qu’il disait « négligents et faibles de caractère », ainsi que les missions catholiques de son diocèse. « Le district est une pépinière de papistes, se plaignait-il. Il n’y a aucune autorité gouvernementale pour les tenir en échec. »
Dans ses dernières années, Bompas se consacra de plus en plus à ses traductions bibliques ; c’est à peine s’il se souciait de son apparence ou des conventions sociales. Il s’aliéna bon nombre des Blancs de Dawson, capitale du Yukon à compter de 1898, et fit peu pour favoriser les relations entre son diocèse et l’Église d’Angleterre au Canada, qu’il trouvait trop peu attachée aux principes évangéliques. Il demeurait fermement convaincu d’avoir raison en matière religieuse. Comme il l’expliqua en 1897 à la Church Missionary Society, « entre la Haute [Église] et l’[Église] large, force m’est d’accepter d’être considéré comme [suivant une voie] extrêmement étroite ».
William Carpenter Bompas démissionna de l’épiscopat de Selkirk le 31 octobre 1905, mais continua d’habiter à Carcross, où son siège épiscopal se trouvait depuis 1901. C’est là qu’il mourut et fut inhumé en 1906. Les journaux le décrivirent comme « un esprit cultivé » et « un linguiste de grand talent », et le tinrent pour « l’un des grands héros de l’Église chrétienne », qui devait être « rangé aux côtés de saint Paul, de saint Pierre et de saint Augustin ». Bien qu’il soit à peu près inconnu aujourd’hui, l’évêque Bompas fut présenté aux anglicans de l’époque victorienne comme un modèle pour tous les chrétiens. Il avait, faisait-on valoir, mené une vie de privation et de dévotion désintéressée, et montré une endurance physique surhumaine dans la « désolation glacée du Nord ».
Les traductions de William Carpenter Bompas d’œuvres religieuses en langues indigènes sont énumérées dans Canadiana, 1867–1900 et dans le National union catalog. Ses publications comprennent aussi Diocese of Mackenzie River (Londres, 1888), Northern lights on the Bible : drawn from a bishop’s experiences during twenty-five years in the great northwest (Londres, [1893]), et The symmetry of Scripture (New York, 1896 ; copie aux EEC, General Synod Arch., Toronto).
AN, MG 17, B2, C, C.1/I ; C.1/L ; C.1/O ; C.2/0 ; G, C.1/I ; C.1/L ; C.1/O ; C.2/O (mfm).— Arch. Deschâtelets, Oblats de Marie-Immaculée (Ottawa), HPF 4191.C75R, no 127 (Grouard à sœur Marie-Colombe, 4 déc. 1865).— PAM, MG 12, E ; HBCA, E.78/1–2.— Provincial Arch. of Alberta (Edmonton), ACC, Diocese of Athabasca records, A.210 ; A.220 ; A.245 ; A.270–271 ; A.281 ; Diocese of Mackenzie River records, MR.170–171 ; MR.181 ; MR.260, pièce 23.— QUA, L. A. Pierce papers, B.005, F003.— Manitoba Morning Free Press, 12 juin 1906 : 15–16.— Montreal Daily Star, 11 juin 1906 : 14.— News (Toronto), 11 juin 1906 : 1.— K. M. Abel, « Bishop Bompas and the Canadian Church », The Anglican Church and the World of Western Canada, 1820–1070, Barry Ferguson, édit. (Regina, 1991), 113–125 ; « The drum and the cross : an ethnohistorical study of mission work among the Dene, 1858–1902 » (thèse de
Au moins deux biographies de Bompas ont été écrites pour les enfants : N. B. M. Grahame, Bishop Bompas of the frozen north [...] (Londres, 1925), et H. A. Cody, On trail and rapid by dog-sled and canoe [...] (Toronto, 1911). Il figure également sous le personnage de M. Charles Snow dans le roman d’Alfred Campbell Garrioch*, The far and furry north : a story of life and love and travel in the days of the Hudson’s Bay Company (Winnipeg, 1925).
Kerry M. Abel, « BOMPAS, WILLIAM CARPENTER », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 13, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/bompas_william_carpenter_13F.html.
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Auteur de l'article: | Kerry M. Abel |
Titre de l'article: | BOMPAS, WILLIAM CARPENTER |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 13 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1994 |
Année de la révision: | 1994 |
Date de consultation: | 28 novembre 2024 |